vendredi 27 août 2010

Baddeley, A. (2000). Le buffer épisodique, nouvelle composante de la mémoire de travail?

On en a déjà parlé récemment avec l'article concernant le livre de B. Lechevalier. Baddeley a récemment revu son modèle de mémoire de travail (MDT) pour ajouter un nouvel élément: le buffer épisodique. Ce serait un élément qui permettrait aux informations contenues en MDT d'accéder en mémoire à long terme (MLT) épisodique, tout en pouvant rester accessibles à la MDT qui peut les manipuler même après un temps très long.
Description de la MDT
ancien modèle de la mémoire de travail de baddeley
Ancien modèle de Baddeley

D'après ce qu'on sait déjà, la mémoire de travail est composé d'un administrateur central (situé dans les lobes frontaux), qui s'occupe de gérer l'action des deux autres éléments: la boucle phonologique, qui permet de traiter les informations verbales et auditives (situé dans les aires 40 et 44 de Brodmann, respectivement pour le cache phonologique et la boucle articulatoire) et la boucle visuo-spatial, pour les informations visuelles (situé dans les aires 6, 19, 40 et 47, principalement dans l'hémisphère droit). Pour chacun, différents effets ont été étudiés, comme par exemple l'effet de similarité phonologique (les éléments auditifs qui se ressemblent sont retenus plus difficilement que ceux qui ne se ressemblent pas. C et G sont plus difficiles à rappeler que F et W), l'effet de longueur des mots (des mots longs sont plus difficiles à mémoriser en MDT car ils prennent plus de place), l'effet de suppression articulatoire (si on empêche la répétition interne d'une information auditive, on a plus de difficulté à la restituer. Cet effet annule l'effet de longueur des mots) ou le phénomène qui transcrit une information langagière lu en information auditive (on a une voix qui lit dans notre tête), pour ce qui concerne la boucle phonologique (des effets similaires ont été observés pour la boucle visuo-spatiale).

Nécessité de revenir sur le concept de Mémoire de travail.
Le modèle de la MDT a été mis au point en 1974, par Baddeley et Hitch, depuis, il est toujours utilisé et répond à de nombreuses attentes dans les domaines de la psychologie cognitive, la neuropsychologie, la neuroimagerie, et d'autres. Mais il y a quand même des faits qu'il ne peut expliquer. Un exemple de neuropsychologie est donné pour mieux comprendre:
Un patient a un problème sur la boucle phonologique, il ne peut donc pas retenir à court terme des informations auditives comme des lettres ou des mots qu'on lui dicte. En même temps, on observe chez lui une difficulté à acquérir un nouveau langage, à apprendre de nouveaux mots, ce qui indique un problème de mémoire à long terme, alors qu'il n'a pas de problème de MLT pour quoique ce soit d'autre. Cela indique donc qu'il y a un lien direct entre la MDT et la MLT pour certaines informations passants en MLT après avoir été travaillées par la MDT. C'est ce que Baddeley inclut dans son nouvel élément : le buffer épisodique.

Le changement de modèle.

Nouveau modèle de la mémoire de travail, Baddeley (2000)
Nouveau modèle de la mémoire de travail de Baddeley (2000)

Baddeley a donc développé un nouveau concept qu'il a inclut à l'ancien. Il l'a appelé Buffer épisodique. A quoi sert-il? Le Buffer Episodique est en fait là pour récupérer les informations de plusieurs types différents, parfois plusieurs en même temps, afin de les consolider en MLT, et également pour faire le lien entre ces deux types d'informations. Il est contrôlé par l'Administrateur central. Baddeley a développé cet élément pour expliquer les problèmes observés par rapport au langage. Depuis, le Buffer est vu comme un élément à part entière de la MDT, utile dans plusieurs domaines qui nécessitent l'utilisation d'une MDT sur le long terme (comme la musique par exemple). Le lien peut être utilisé dans les deux sens (bottom-up et top-down), par exemple en mémorisant des informations sur le long terme pour le premier et en utilisant des informations connues (comme des phrases) pour que les mots qu'on doit retenir soient plus faciles à retenir (ex: on ne retient que 5 ou 6 mots quand ils n'ont pas de liens entre eux, mais 16 quand on peut en faire des phrases, qu'on forme grâce à notre MLT en association avec la MDT (preuves neuropsychologiques, cf. l'article pour plus de détails)). Ce dernier point est appelé Chunking et a été développé par Miller (on y reviendra peut être dans un autre article).
Au final, à quoi sert-il?
Le buffer épisodique est utile de nombreuses façon:
  • Il permet de faire le lien entre les informations visuelles et les informations auditives
  • Il permet de manipuler des informations autres que visuelles, auditives ou kinesthésiques
  • Il permet de consolider des informations visuelles, auditives et autres en MLT (Processus Bottom-up)
  • Il permet d'accéder à la MLT pour faciliter l'utilisation de la MDT (comme par exemple en formant des phrases pour mieux retenir des mots) (processus Top-Down)
  • Il permet de faire perdurer une certaine forme à long terme de mémoire quand la MLT est endommagée mais pas la MDT (données neuropsychologiques)
  • Il permet de pouvoir reprendre des informations contenues en MLT pour effectuer des opérations dessus grâce à la MDT
  • Il mémorise des "épisodes", plus longs que les items classiques, et permet d'avoir un empan supérieur grâce au phénomène de Chunking (associations de divers items qui n'en deviennent plus qu'un seul).

Source: Baddeley, A. (2000). The episodic buffer: a new component of working memory?, In Trends in Cognitive Sciences, 11 (4)

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